Développement maîtrisé de l’apprentissage : confirmation des objectifs et adaptation des modalités d’intervention de la Région

Intervention de Dominique Martin – 10 avril 2008

Rapport n° 08.02.241

Monsieur le Président, chers collègues,

Dominique-MartinJe suis heureux qu’un débat sur les formations continues ait lieu en assemblée plénière car voilà près d’un an et demi que cela ne s’était pas passé. En effet, notre dernier débat en la matière remonte à novembre 2006, il y a 17 mois.

À croire que ce n’était plus une priorité pour vous, impression d’autant plus forte que l’on retrouve à présent de façon transversale comme vous dites des dépenses de formation continue dans chacune de nos commissions thématiques nous donnant ainsi la terrible impression que vous cachez les miettes sous le tapis, ne sachant par quel bout aborder le problème, bien qu’il s’agisse là d’une de nos compétences majeures dotée d’un budget considérable, le troisième après les transports et la formation initiale.

Vous revenez aujourd’hui sur le développement maîtrisé de l’apprentissage, projet présenté voici 3 ans déjà, le 7 avril 2005, pour confirmer vos objectifs et nous présenter l’adaptation des modalités d’intervention de la Région.

Monsieur le Président, chers collègues, reconnaissons que la démarche est honnête.

Honnête d’une part parce que vous admettez enfin que l’apprentissage est efficace et je vous cite : « En effet, toutes les données montrent que cette voie de formation jusqu’alors peu considérée donne aux jeunes une qualification reconnue par les entreprises et favorise leur insertion professionnelle réussie. », ce que le Front National vous claironne depuis des décennies Monsieur le Président.

Honnête d’autre part parce que vous admettez également que les moyens financiers mobilisables sont insuffisants et je vous cite à nouveau : « Le succès de cette politique au plan quantitatif et qualitatif risque toutefois d’être rapidement confronté à un problème global de financement qu’il convient d’anticiper. »

Nous y voilà ! Vous semblez découvrir enfin que l’argent est le nerf de la guerre et qu’avant de le dépenser il faut le gagner. Pour des idéologues, bel effort de pragmatisme !

La faute à qui selon vous ? À l’État bien sûr. Mais ce n’est pas nouveau Monsieur le Président, et vous savez comme nous, la décentralisation tant appréciée par votre famille politique n’est en réalité qu’un transfert de charges. Gouverner, c’est prévoir et vous n’avez rien prévu depuis 2004 que vous êtes aux affaires.

La faute à qui aussi ? Aux entreprises bien entendu, et je vous cite : « La structure de la taxe d’apprentissage et de la contribution au développement de l’apprentissage assise sur les salaires laisse craindre, compte tenu de la conjoncture économique, un plafonnement de cette ressource » alors que, notre collègue Dullin vient de le rappeler, les entreprises sont le plus gros contributeur pour la taxe d’apprentissage.
Pour remédier à ce grave problème, vous nous proposez 14 mesures ciblant 4 priorités :

1. L’adaptation des modalités de détermination de la subvention de fonctionnement aux CFA. Pourquoi pas ?

2. La meilleure prise en compte de l’effort de formation des employeurs d’apprentis. Pourquoi pas ?

3. La meilleure prise en compte des conditions de vie et de formation des apprentis ? Pourquoi pas ?

4. La clarification du financement de l’investissement dans les CFA. Pourquoi pas ?

14 mesures en donnant délégation pour chaque priorité curieusement à la commission permanente pour les modalités d’application, ce qui, Monsieur le Président, en dit long sur la pertinence de vos choix et surtout sur votre détermination.

En gros, comme tout système socialiste, vous décrétez encore plus de conventions, encore plus de règles, encore plus de contrôle, réduisant ainsi tout esprit d’initiative.

Monsieur le Président, chers collègues, c’est exactement l’inverse qu’il faudrait faire. Puisqu’il s’agit de la formation aux métiers, rendez l’initiative et la liberté aux entreprises pour gérer la transmission de leur savoir-faire.

Vous auriez dû être attentif à ce que nous vous avions dit voici 3 ans, je vous le rappelle et j’ouvre mes guillemets : « Si les moyens sont là, si les structures sont au rendez-vous, votre volonté socialiste de vouloir tout égaliser va casser la dynamique déjà bien faible des CFA et des entreprises en faveur de l’apprentissage.

Comme l’Exécutif en fait le constat, il y a deux sortes de CFA : ceux qui bénéficient directement du versement de la taxe d’apprentissage par les entreprises et ceux qui n’ont que la subvention régionale.

Les premiers, volontaires, travaillent en synergie avec les employeurs afin de former les salariés dont ils ont besoin. Ce faisant, ils récoltent leur taxe d’apprentissage et bénéficient ainsi d’un budget confortable leur permettant d’investir sans cesse dans des matériels parfois onéreux et dans la qualité des formations transmises.

Aussi, les entreprises profitant du retour sur investissement prennent bien volontiers des stagiaires en alternance assurant ainsi le renouvellement naturel et normal de leurs salariés.

Les seconds, passifs, ne cherchent pas la performance et se contentent de gérer des flux et ce de façon médiocre. Il est évident que les employeurs concernés ne sont pas motivés ni pour verser leur taxe ni pour prendre en charge les stagiaires.

Pour résoudre ce qui vous paraît être une inégalité, vous avez trouvé la solution et vous nous l’aviez annoncée à l’époque : si globalement l’aide aux CFA va progresser, l’aide aux entreprises stagne même si elle a changé de nom devenant l’aide aux employeurs et aux apprentis. Le grand changement vient de votre volonté affirmée de maîtriser le reversement de la taxe d’apprentissage. À terme, il ne sera plus question pour les entreprises de choisir leur CFA.
En clair, chers collègues, cela signifie que les CFA auront un budget identique qu’ils collectent ou pas de la taxe d’apprentissage, qu’ils soient performants ou pas.

Une fois encore, l’idéologie socialiste favorise la médiocrité au détriment du mérite et de l’effort.

Dans ces conditions, peut-on croire sincèrement que les entreprises déjà soumises à d’énormes contraintes réglementaires pour accueillir des stagiaires vont en multiplier le nombre par 1,6, votre objectif, alors qu’elles sont en difficulté financière, qu’elles débauchent et qu’elles n’auront plus de lien privilégié avec leur CFA ?

Depuis près de cinquante ans, l’Éducation nationale considère la formation aux métiers comme un enseignement de seconde zone réservé aux enfants dits en échec scolaire. Et les familles tombent dans le leurre du bac facile et des études supérieures pour tous.

L’expérience nous montre désormais pourtant que l’on accède plus facilement à un métier par l’apprentissage alors que les diplômés gonflent les chiffres de l’ANPE.

Il devient urgent de revaloriser la formation aux métiers et ce dès l’entrée dans le second cycle. Apprendre un métier dès l’âge de 14 ans, c’est l’assurance d’avoir un emploi avant l’âge de 20 ans. Transmettre un savoir-faire, un métier, est aussi utile à la société que de former des professeurs ou des chercheurs.

Grâce à l’apprentissage, certains enfants motivés, intéressés et reconnus parviennent au statut d’ingénieur.

Pour réussir, et en conclusion, il nous faudrait :

1. Mettre l’entreprise au centre de tout dispositif et lui donner les moyens de transmettre ses savoir-faire, ce qui n’est pas le cas actuellement, loin de là. Ce n’est pas avec 1 500 € par an que vous motiverez les gens.

2. Mettre à égalité de moyens apprentissage et scolarité initiale, ce qui est loin d’être le cas.

3. Mettre à égalité de reconnaissance formations aux métiers et filières diplômantes.

Je ferme mes guillemets. Monsieur le Président, chers collègues, je vous remercie de votre attention.

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