Fonds européens, adoption des programmes et modalités de gestion (avec vidéo)

Intervention de Pierre Comet, Conseiller régional, rédigée par Bruno Gollnisch, Député européen et président du groupe FN au Conseil régional – 3 octobre 2014

Rapport n° 14.14.453

Bruno Gollnisch, absent en Assemblée plénière, a critiqué par la voix de son collègue Pierre Comet  l’utilisation des fonds européens par la Région Rhône-Alpes :

Monsieur le Président, mes chers collègues,

Bruno-Gollnisch-ptPierre COMETVous nous proposez aujourd’hui l’adoption d’un rapport relatif aux programmes et modalités de gestion des fonds européens destinés à la région Rhône-Alpes.

Comme vous l’exposez, ces fonds transitaient naguère par l’État, qui procédait aux arbitrages nécessaires, en répartissait les montants entre les régions concernées, et faisait ainsi écran entre l’Union Européenne et les collectivités régionales. L’article 78 de la loi du 27 janvier 2014 a permis aux régions qui en font la demande de devenir autorité de gestion de ces programmes européens.

Dans le principe, nous devrions être assez heureux de voir disparaître un écran bureaucratique qui interférait avec un processus de redistribution financière extrêmement lourd, et dont le coût mériterait d’être évalué ! On peut en juger par l’importance des annexes que comporte la présente délibération… Et, au fait, ces agents « déconcentrés de l’Etat : dont vous prévoyez ici les modalités de transfert par qui seront-ils payés ?

Nous sommes également satisfaits que la région Rhône-Alpes récolte quelques miettes tombées d’un festin européen où la France apporte beaucoup plus qu’elle ne reçoit, puisqu’elle demeure contributeur net chaque année à hauteur d’environ 9 milliards d’euros. Mais allons plus loin encore : ne serait-il pas plus simple en conséquence que cet argent reste en France, et que, sans transiter par l’Union Européenne, ni par l’État, ni d’ailleurs pas la collectivité régionale, il serve directement, soit à la consommation des ménages, soit à l’investissement des entreprises, sans autre interférence ?

Nous voyons bien également quelle évolution se dessine dans l’ensemble de ces processus : c’est le rêve des Eurocrates de Bruxelles que de n’avoir plus en face d’eux que 150 à 200 collectivités territoriales comme interlocuteurs. Des interlocuteurs en position de quémandeurs de la redistribution d’une partie de la manne préalablement prélevée sur leurs habitants. Donc des interlocuteurs soumis, dociles, et pour tout dire vassalisés. Cependant que les Etats, représentant des Nations dont le démembrement est d’ailleurs activement poursuivi, se voient progressivement marginalisés.

Cette évolution n’est pas nouvelle. En 1986 déjà, Michel Debré, à la Commission des Affaires Etrangères de l’Assemblée Nationale, s’indignait de ce que certaines Régions aient ouvert de véritables ambassades à Bruxelles, en violation des règles de droit jusque-là admises, et jamais abrogées, selon lesquelles l’État exercerait le monopole des relations extérieures. Que ne dirait-il pas aujourd’hui, alors que cette pratique c’est généralisée !

Mais venons-en au dossier lui-même. Sa compréhension est rendue plus difficile par le jargon qui envahit progressivement ces procédures et les documents qui en rendent comptent. De quoi s’agit-il et que finance-t-on CONCRÈTEMENT ?
Il ressort que :
– Le Programme opérationnel régional «dit « bi-fonds » parce qu’il implique à la fois le FEDER et le FSE, (en bon français : le Fonds Européen de Développement Régional, et le Fonds Social Européen) comporte 4 axes, dont les énoncés sont aussi ambitieux qu’abstraits. On comprend cependant que :
– Le premier de ces axes porte notamment sur la couverture à très haut débit des entreprises et des sites publics ; pourquoi pas en effet ?
– Le second sur la transition énergétique, qui est un peu la ritournelle du moment, avec entre autres des améliorations recherchées de la performance énergétique des logements sociaux et des administrations.
– Le troisième sur le soutien à « l’emploi durable », et à la mobilité de la main d’œuvre,
– Le quatrième à la formation « tout au long de la vie » selon la formule consacrée.

Ces intentions ne sont en elles-mêmes pas l’objet de nos critiques.

A tout cela s’ajoutent les efforts programmés au titre de la cohésion territoriale. On nous promet des ITI, c’est-à-dire des investissements territoriaux intégrés. La Région en sélectionnera entre quatre et sept. L’objectif est de parvenir à un développement urbain «durable». Cette « durabilité » mise à toutes les sauces, mauvaise traduction de l’anglais (sustainable), nous laisse perplexes. Enfin, chacun de ces projets devrait bénéficier d’une enveloppe comprise entre 4 et 10 Millions d’Euros ; c’est toujours cela de pris.

Parmi les « POP » – entendez par là les « Programmes opérationnels pluri-régionaux », il y a le POP Rhône-Saône. Nous nous interrogeons sur la répartition des rôles avec la CNR (Compagnie Nationale du Rhône), dont la création, déjà ancienne, recoupe quant aux compétences celles attribuées au POP en question. Permettez-nous d’exprimer notre scepticisme quand nous lisons que l’un des objectifs de ce programme serait « relatif aux transports afin de renforcer l’attractivité économique du transport fluvial ». Chacun sait qu’en réalité la condition d’un tel objectif supposerait que l’on achevât la liaison à grand gabarit Rhône-Saône-Rhin, cent fois promise mais en fait tombée à l’eau, c’est le cas de le dire, emportée au fond du canal par son poids financier et son coût environnemental. Qu’on le regrette ou qu’on s’en félicite, nous n’entrerons pas aujourd’hui dans ce débat. Ce qui est sûr, c’est qu’en l’absence de cet équipement, il est illusoire d’attendre un développement de la batellerie Rhodanienne.

Nous aurions beaucoup d’autres observations à faire, que ce soit sur le programme ALCOTRA de coopération transalpine avec l’Italie, le programme France-Suisse, les programmes de massifs, le programme de développement rural du FEADER, la programmation LEADER, etc. sans compter la réorganisation –et la réduction- des procédures d’aide à la création cinématographique, à laquelle vous contraint la réglementation européenne, ce qui est tout de même la preuve de son caractère d’omniprésence. Mais la délibération porte sur les procédures, et non sur leur opportunité. Qu’il nous soit permis de dire en conclusion que celles-ci nous paraissent lourdes, abstraites, convenues, dépourvues bien souvent d’objectifs concrets, mis à part les inévitables références aux gaz à effet de serre et aux thèmes environnementaux à la mode. Qu’il s’agisse d’entreprises, d’agriculteurs, de chercheurs, on ne parle que de mise en réseau, de coordination, de synergies à créer, , de clusters, etc. , comme si les divers intervenants économiques et sociaux, par nature débiles, étaient incapables de trouver eux-mêmes les partenaires qui leur conviennent. Mais concrètement, quelles réalisations, perceptibles par les citoyens, utiles à leurs activités, leur cadres de vie, attend-on de cette pluie de subventions ? Le sujet est trop souvent occulté par des considérations procédurales. En d’autres termes, et trop souvent, les finalités concrètes nous échappent. Et une question nous taraude alors : « au bout du compte, à quoi ça sert ? »

Dans ces conditions, regrettant les lourdeurs et les imprécisions, méfiants à l’égard de l’évolution institutionnelle, mais ne voulant pas opposer d’obstacle systématique, nous nous abstiendrons sur l’ensemble de ces dossiers. Nous voterons seulement (p. 104) contre les dispositions relatives à l’intrusion de l’Union Européenne dans nos procédures d’aide régionale à la création audio-visuelle, considérant que l’Union ne devrait pas avoir qualité pour règlementer un secteur relevant d’abord de la création culturelle, et qui ne saurait être considéré comme relevant exclusivement du secteur marchand.
Je vous remercie de votre attention.


Critique de l’utilisation régionale des fonds… par FNRhoneAlpes

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