Contrat de plan Etat-Région 2015-2020 et contrats de plan interrégionaux (avec vidéo)

Intervention de Christophe Boudot, président du groupe FN au Conseil régional – 6 mars 2015

Rapport n° 15.00.196

Monsieur le Préfet, Monsieur le président, mes chers collègues,

PhotoCBA quelques semaines de la signature du contrat de plan Etat–Région pour la période 2015–2020, vous nous soumettez, Monsieur le président, ce rapport de présentation très complet, assez indigeste, il faut bien le reconnaître.

Depuis quelques semaines, vous avez présenté les volets départementaux du CPER dans les territoires. Ces collectivités ne se sont pas encore prononcées, elles attendent la présentation de leur plan pluriannuel d’investissement avant l’été.

Par ailleurs, le bouleversement politique sans précédent qui s’annonce lors des prochaines élections départementales n’encourage pas les exécutifs départementaux à s’engager vraiment, car pour la plupart d’entre eux, ils ne seront plus aux commandes de leur département dans trois semaines.

Avant d’aborder le fond, permettez moi quelques remarques de pure forme,

Avant tout, ce contrat de Plan consacre une organisation administrative globale que nous rejetons parce qu’elle nous semble déconnectée de la volonté et de l’usage des populations.

La cacophonie de la réforme territoriale n’engage pas vraiment à l’optimisme.

Les départements, à moitié maintenus, dont le Premier ministre avait annoncé la suppression prochaine avant de faire machine arrière… Les métropoles, tentaculaires et couteuses, notamment celle de Lyon qui joue la concurrence frontale et vient de voter un budget équivalent à notre collectivité régionale. Les Euro – Régions, comme la notre, qui vont chercher une partie importante des financements directement auprès de l’Union Européenne et qui lorgnent sur les compétences d’autres collectivités.

A titre d’exemple, qu’en sera t il des infrastructures routières ou de l’activité économique et de l’emploi ?

A qui la loi va-t-elle les attribuer, à moins qu’elle ne décide finalement de les partager ? Décidément, aucune clarification des compétences n’est attendre vraiment de cette loi « Notre » qui tarde à venir.

Ce document CPER par lequel l’Etat et la Région s’engagent sur une programmation d’investissement pluriannuelle est bel et bien un contrat d’engagement mutuel.

Mais on a vu, notamment lors de notre séance du 2 octobre dernier consacrée au cinquième plan Etat-Région que l’Etat tenait rarement la totalité de ses engagements et que la Région avait été obligé d’en faire plus, notamment dans le domaine de l’enseignement supérieur et de la recherche où l’Etat n’avait honoré que 74 % de son engagement contractuel.

Globalement, concernant le dernier CPER, pourtant prorogé d’un an, l’Etat avait assumé 93 % de ses engagements et la Région plus de 125 % pour un montant total de 1.4 milliards d’euros.

L’Etat, cette fois ci, pour ce sixième plan, va-t-il tenir vraiment ses promesses ?

Ce contrat de sixième génération prévoit ainsi un montant global d’engagement de 4.5 milliards d’euros, avec un engagement mutuel de l’Etat et de la Région d’environ 1 milliard chacun. Cet engagement sera également complété par 1.5 milliards supplémentaires provenant de l’Etat, de la Région et des organismes HLM au titre de l’enveloppe de la politique de la ville et notamment sur la rénovation de quartiers prioritaires.

Monsieur le président, Monsieur le Préfet représentant l’Etat, vous avez décidé d’engager la puissance financière de ce plan sur trois axes principaux :

La mobilité, l’enseignement supérieur et la recherche, et le développement numérique.

Abordons l’aspect mobilité de ce contrat d’un montant d’un milliard d’euros.

La configuration géographique de notre région est tout à fait originale, je vous l’accorde, notre région est véritablement le carrefour de la mobilité européenne, et cette charge naturelle requiert une mise en cohérence et un outil contractuel performant pour garantir aux Rhônalpins la continuité territoriale à laquelle ils ont droit.

D’abord le volet ferroviaire :

Le budget consacré au ferroviaire est d’environ 600 Millions d’euros, soit deux-tiers de l’enveloppe consacrée à la mobilité. Les projets sont identifiés : la modernisation du nœud ferroviaire lyonnais dont on parlait déjà en 1952 lors de l’électrification du tracé Paris-Lyon pour un montant de 421 millions et le réaménagement de la gare de la Part Dieu dont la voie supplémentaire, la voie L, apparaît indispensable aujourd’hui et qui coutera plus de 70 millions d’euros.

L’autre projet ferroviaire que vous fléchez à juste raison est le maintien des petites lignes ferroviaires, la régénération des petites lignes si indispensable au maillage territorial et à la mobilité des Rhônalpins : Oyonnax – Saint Claude, Lyon – Paray-le-Monial, etc…76 millions d’euros sont consacrés dont seulement 20 millions de l’Etat.

On constate malheureusement l’absence d’un volet fret ferroviaire spécifique à ce contrat de plan.

D’autres financements nous posent problème, notamment les crédits accordés au projet Lyon-Turin.

Après avoir acté lors du sommet franco–italien du 23 février dernier la réalisation de la liaison ferroviaire transalpine, 12 millions d’euros d’études et d’acquisition foncières seront employés. Vous n’êtes plus très sur d’avoir la majorité politique pour ce dossier, mais l’Etat a repris la marche en avant.

Pour près de 120 Millions d’euros, vous lancez des nouveaux modes de transport par câble, le « Fluniflaine », reliant la gare de Magland à la station de Flaine, à Grenoble à Chambéry , a Saint-Etienne, la ville aux sept collines.

Le volet fluvial multi modal est trop faible, en tous cas pas à la hauteur des enjeux. L’Etat investira un peu plus de 3 millions d’euros alors qu’il devrait entreprendre le développement accéléré du transport fluvial des marchandises.

Le volet routier est bien trop timide, sous la pression de votre ancienne majorité, vous savez…celle autrefois composée des verts. Vous limitez vos opérations importantes à deux départements, l’Ardèche et la Drome alors que d’autres projets sont tellement urgents.

L’autre grande priorité du CPER est l’enseignement supérieur recherche et Innovation :

Effectivement, c’est une priorité tant les besoins sont importants, et avec l’accession de l’autonomie des universités entre 2009 et 2012, l’Etat n’est plus en capacité, seul, de s’occuper des universités françaises.

La région Rhône-Alpes, deuxième pole universitaire de France est riche de 9 grandes universités

Le montant consacré est supérieur au CPER précédent. Il faut supporter d’avantage les défis de demain : favoriser la mobilité internationale des étudiants et rapprocher la recherche et l’innovation des filières économiques, sources d’emplois de demain ; favoriser les plateformes technologiques et d’innovation en lien avec l’entrepreneuriat.

L’université est victime de la désagrégation du système scolaire français, elle doit accepter les élèves post bac qui accumulent souvent les lacunes depuis l’école primaire.

Remercions au passage les « pédagogistes » des années 80 qui auront finalement affaibli le niveau global de nos enfants, sacrifié deux générations d’élèves dont les savoirs de base et la capacité à écrire, lire et compter sont gravement déficients.

Nous sommes d’accord, l’enseignement supérieur et la recherche sont une priorité de l’Etat et des Régions. Comment pourrait il en être autrement ?

Un autre pilier de ce contrat de plan est le développement du numérique et du haut débit :

La couverture du territoire en haut débit est également une priorité que nul ne peut contester. L’objectif de la couverture de l’ensemble du territoire en 2022 et est ambitieux mais doit être atteint. N’oublions pas les zones rurales, éloignés des centres et des métropoles bien irriguées. Tout l’effort public doit être consacré à cet aménagement du territoire et à l’accès du plus grand nombre au savoir numérique.

Toutefois, après ces trois axes majeurs que nous pouvons que soutenir, le CPER contient d’autres priorités, moins ambitieuses financièrement mais beaucoup plus idéologiques. Ces autres priorités impriment votre marque et celle de l’Etat sur ce nouveau CPER.

Ces soutiens pour lesquels nous formons plus de réserve, pour ne pas dire une opposition farouche, quels sont ils ?

D’abord l’aide internationale qui ne peut être par nature de compétence régionale, vous connaissez notre position en la matière car nous pensons que c’est à l’Etat de développer de grandes politiques de coopération suivant ses propres intérêts géostratégiques et humanitaires.

Ensuite bien sur, il y a vos expérimentations sociétales, l’égalité femme homme et de la mixité, la lutte contre les stéréotypes sexués, la quinzaine de l’égalité. Tous vos dispositifs idéologiques nous n’en voulons pas ! Car finalement sous couvert d’égalité, c’est l’égalitarisme et la négation du naturel que vous voulez à tout prix promouvoir.

La politique de la ville :

Vous vous gargarisez des quartiers rénovés et des politiques de l’ANRU et vous déplorez la pauvreté qui règne dans les quartiers, l’illettrisme des jeunes de 18 à 29 ans, et des discriminations.

Vous voulez sans doute parler de ces Français qui, tentés par des programmes de logements neufs attractifs, se sont endettés pour accéder à la propriété dans des quartiers modernes et rénovés et qui ont finalement trouvé la promiscuité d’un communautarisme débridé, un manque criant de mixité sociale car une majeure partie de la population appartient souvent au même standard religieux et culturel. Mais qui souhaitent quitter ces quartiers même rénovés pour se sentir en meilleures sécurité et en harmonie avec leur environnement ?

La justice ,Monsieur le président, c’est d’abord la sécurité et aussi la qualité de vie des habitants.

Abordons également le volet sur la transition énergétique :

Le dérèglement climatique est une réalité, encore faut il s’entendre sur les causes de ces dérèglements multiples. Vous connaissez notre position en la matière qui est très loin d’être alignée sur les vôtres et celles du GIEC.

Certes, nous pouvons nous accorder sur une vaste démarche d’économie d’énergie. Nous soutenons la rénovation des bâtiments pour réduire les consommations énergétiques et créer des emplois souvent non dé localisable. L’Etat et les bailleurs sociaux ont un rôle moteur à jouer en la matière.

De même, développer les transports propres, c’est bien ! Nous le réclamons aussi. Mais force est de constater que rien n’est prêt aujourd’hui pour offrir une véritable alternative afin de permettre le développement des véhicules propres.

Une majorité de Rhônalpins a besoin d’un véhicule, et l’enjeu est encore plus important dans les territoires ruraux de montagnes, sans parler des départements d’Auvergne par exemple.

Il ne faut pas opposer les transports collectifs au mode de transport particulier comme vous le faites si souvent et donner la liberté de choix aux Rhônalpins dont les situations de vie sont toutes différentes.

En conclusion, ces milliards du CPER que l’Etat et les collectivités emploient, l’argent de la manne européenne, n’oublions jamais que c’est l’argent tiré du même contribuable rhônalpin et que le consentement à l’impôt est un des piliers essentiels de notre démocratie.

Or, l’usage dont l’Etat et la Région font des ressources fiscales et l’augmentation continuelle des taxes et des impôts semble faire vaciller ce consentement à l’impôt chèrement acquis au cours de notre histoire.

L’argent public doit servir l’intérêt général et pas irriguer des marqueurs idéologiques couteux et souvent réservés aux mêmes.

Je n’ai pas encore parlé de la fusion avec la région Auvergne , puisque celle-ci n’apparaît pas dans le Contrat de plan qui nous est soumis. Pourtant dans moins d’un an, notre collectivité aura changé, nos besoins auront changé, les enjeux du territoire de cette grande région ne seront plus les mêmes.

Vous avez prévu une clause de revoyure en 2016 pour acter ce rapprochement, mais cette clause de revoyure devra être beaucoup plus ambitieuse qu’une simple addition technique des priorités des deux régions. Elle devra prendre en compte la réalité de cette nouvelle eurorégion que vous nous imposez.

Soyons clair, Monsieur le président, tout porte à croire que vous ne serez plus à la tête de cette Région l’année prochaine et que certaines de vos priorités devront être corrigés et même purement et simplement supprimés par la nouvelle majorité.

Il s’agira alors d’engager toute la puissance financière de la Région sur les sujets qui la concerne légalement, sur des compétences resserrées et libérées de la clause générale qui limite tellement l’efficacité de son action.

Il s’agira par exemple d’entreprendre une grande réforme de l’accès à l’emploi, celle que nous attendons tous, celle de la formation professionnelle directement adossée à l’entreprise par l’alternance.

Sortir la Région des griffes idéologiques du socialisme qui a échoué, c’est tout l’enjeu de ces prochains mois et malheureusement ce nouveau CPER socialisant engage pour six ans l’avenir des Rhônalpins, avenir dont vous serez sans doute exclu demain.

Dans ces conditions et compte tenu de toutes les réserves que je viens d’évoquer, nous voterons contre ce sixième plan Etat-Région.

 


Christophe Boudot (FN) critique le CPER 2015-2020 par FNRhoneAlpes

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